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Le mot des hivernants
juin 2003
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Midwinter : 11TA - Clowns
(photos hivernants 53ème mission, juin 2003)
La perspective d’entrer
dans l’hiver austral avec ses sous-entendus de temps polaire capricieux, la
patience légendaire des manchots Empereur attendant l’heureux événement et
enfin, la traditionnelle fête de la « mid-winter » dont les récits nombreux
oraux ou écrits des prédécesseurs résonnant en nos esprits impatients ont
fait de ce mois de juin le plus attendu voire le point d’orgue de l’hivernage.
Mais qu’en a-t-il été ? La neige jouant à l’Arlésienne, il a fallu se
contenter des teintes noirâtres des îles de l’archipel, taches tristes sur
une banquise qui a perdu depuis longtemps, par les affronts du vent, sa
blancheur immaculée. Seul, le ciel a été une gigantesque palette quand le
soleil, bien paresseux, a daigné se dresser au-dessus de l’horizon et se
montrer, en grand timide, entr
e
deux icebergs. L’espace d’un faible rayon, tous les tons pastels du rose au
bleu ôtaient subitement de cet environnement toute hostilité, le rendant même
dispensateur de chaleur diffusant une confiance certaine. Ah, le beau mirage !
Quelques aurores ont illuminé les longues nuits et de nombreux courageux n’ont
pas hésité à affronter le froid pour admirer notre galaxie auréolée de
magnifiques traînées mouvantes. Si dame Météo a omis de déployer son beau
manteau blanc sur l’île des Pétrels, par un passage à moins 31 degrés,
elle nous a rappelé fermement que nous étions en hiver. Elle a laissé devenir
bienfaiteurs les plus faibles rayons de l’astre du jour. En effet, ils ont
rendu possible de courtes mais nombreuses visites aux manchots Empereur. Nos
voisins commencent à s’impatienter, mais n’est-ce pas plutôt l’hivernant
? Qui ne voudrait pas déjà entendre et voir les jolis poussins ?
Imperturbables, sur leur œuf, attendant leur femelle pour la relève, les
mâles chaloupent d’un talon sur l’autre allant et revenant en d’interminables
chapelets. Ce n’est pas encore le moment de céder à l’appel de l’estomac
qui commence à crier famine. Heureusement, durant ce temps où l’obscurité a
été maîtresse en concédant très peu d’heure de luminosité, les esprits
ont été captivés par la préparation de la « mid-winter »
. Le conseil des
« vieux » et la fougue des plus jeunes ont permis à cette traditionnelle
fête de l’Antarctique de s’organiser. De petits groupes se sont partagé la
décoration, le montage de l’estrade et de la sonorisation ainsi que l’organisation
de divers jeux. Les derniers jours ont été le témoin d’une nervosité bien
légitime. Serons-nous prêts ? Toute la mission participera-t-elle ? Les
éléments permettront-ils les activités extérieures ?… Enfin, le 21 au soir
le décor a été dévoilé : une forêt amazonienne
débouchant sur une plage de sable fin rapidement foulée par des pieds avides
de lointaines sensations ! La soirée tropicale a ouvert les festivités. Les
déguisements ont été plutôt légers, très colorés et la musique
lancinante. Première nuit blanche de la série, et pourtant, il a fallu se
lever pour les olympiades à 11 heures le 22. A suivi l’élection du 11 TA.
Après un débat houleux, l’urne a désigné le mécanicien de précision. Son
programme était sans équivoque : tout par la force et l’intimidation, à l’appui
hommes cagoulés, missiles et armes en tout genre. Le rallye organisé à l’extérieur,
par moins 20 degrés, a donné l’occasion de s’aérer et de soigner les
multiples et récidivantes « aigreurs d’estomac ». Les spectacles de
cabaret, après un dîner bien arrosé, ont fait découvrir des talents cachés
de comédiens, de marionnettistes, de clowns-jongleurs, de conteurs et de
monteur en vidéo tout genre… Il faut encore citer la kermesse, le feu de la
saint Jean, les contes, les déguisements de stchroumpfs, le karaoké. Le 27 au
soir, l’élection de « Miss et mister TA » a clôturé élégamment cette
semaine. Beaucoup d’ingéniosité dans la confection des costumes, des décors
et de virtuosités chez les D.J pour faire danser tout le monde au diapason. La
« mid-winter 2003 » est maintenant tombée dans le monde des souvenirs. Le
réveil à la routine est encore dur et difficile. Si elle n’a pas réussi à
favoriser un quelconque resserrement d’un lien durable, elle a eu le mérite
de nous en donner l’illusion l’espace d’une semaine. Ce fut, évidemment,
la meilleure de toutes les annales !